(Agence Ecofin) – Avec ce plaidoyer, Serge Ekué espère inscrire la BOAD dans la lignée des grandes banques multilatérales qui voient dans les DTS non seulement un instrument monétaire, mais un véritable levier de développement et d’accroissement des capacités des banques de développement.
« Ce que nous proposons va encore plus loin : la banque de développement émet un instrument de capital hybride et invite les grands investisseurs comme la France et l’Allemagne à souscrire en utilisant les DTS comme devise d’investissement. C’est une idée révolutionnaire. Utiliser les DTS comme instrument d’investissement dans des titres émis par des banques de développement régionales est une véritable révolution », a proposé Serge Ekué (photo), président de la Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD), ce vendredi 18 octobre à Bruxelles.
L’intervention d’Ekué s’est faite en marge du Rebranding Africa Forum 2024, où il a défendu une vision ambitieuse : transformer les Droits de Tirage Spéciaux (DTS) du Fonds Monétaire International (FMI) en un levier pour financer des projets de développement en Afrique, à travers l’émission d’obligations par des banques régionales comme la BOAD.
Face aux défis financiers et climatiques croissants, ainsi qu’à la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), cette approche se veut une réponse innovante pour mobiliser des capitaux nécessaires au renforcement des banques de développement. D’autant que, selon la BAD, le déficit de financement sur le continent est estimé à environ 402 milliards $ par an jusqu’en 2030, et l’écart entre l’offre et la demande de financement pour le commerce en Afrique est évalué à 120 milliards de dollars annuellement.
« La Zlecaf aura un rôle transformateur pour l’Afrique, mais pour réussir, elle devra s’appuyer sur des banques de développement capables de mobiliser des financements à grande échelle », a d’ailleurs appuyé l’un des panélistes de la CEMAC lors de cette première journée de la dixième édition du Rebranding Africa Forum.
Une nouvelle forme d’utilisation des DTS après le mécanisme de la BAD et de la BID
La proposition de Serge Ekué est une nouvelle forme de réorientation des DTS, après les initiatives récentes de la Banque Africaine de Développement (BAD) et de la Banque Interaméricaine de Développement (BID), qui sont en train d’obtenir gain de cause. En mai dernier, le Fonds Monétaire International a approuvé le mécanisme de réaffectation des DTS via des instruments de capital hybride, censé permettre d’optimiser l’utilisation de ces actifs de réserve au profit des banques multilatérales de développement (BMD).
Concrètement, ce mécanisme permet aux pays riches, détenteurs de DTS inutilisés, de prêter ces fonds aux banques de développement. Ces dernières peuvent ensuite lever jusqu’à quatre fois la valeur des DTS prêtés sous forme de prêts pour financer des projets critiques, notamment dans les domaines de la sécurité alimentaire et de la lutte contre les changements climatiques.
Cependant, contrairement à la BOAD, la BAD et la BID détiennent directement des DTS, ce qui leur confère une plus grande flexibilité dans l’utilisation de ce mécanisme.
Pour la BOAD, qui ne peut pas détenir directement de DTS en tant qu’institution non membre du FMI, la situation est différente. « Nous avons dû réfléchir à une solution alternative. La BCEAO, notre actionnaire de référence, possède des DTS», a précisé Serge Ekué. C’est dans ce contexte que le président de la banque basée à Lomé propose un instrument de dette permettant aux investisseurs d’utiliser les DTS comme devise d’investissement dans des obligations émises par la banque.
L’idée est de convaincre des pays riches ou des institutions internationales de souscrire à ces instruments, tout en garantissant la traçabilité et l’utilisation rigoureuse des fonds. « Je suis très favorable à ce qu’on appelle le “rechanneling” des DTS, c’est-à-dire la réallocation des Droits de Tirage Spéciaux via les banques de développement. Nous avons la capacité de suivre l’utilisation des DTS et de garantir que chaque dollar, euro ou DTS est utilisé de manière optimale pour financer le développement durable », a souligné Ekué.
Des résistances politiques persistantes
Malgré les avantages potentiels, cette proposition rencontre encore des résistances, en particulier de la part des pays donateurs. « Les grandes économies craignent que l’utilisation des DTS ne réduise la pression sur les États africains pour mener des réformes structurelles. Cette idée fait face à des réticences, notamment en Allemagne et aux États-Unis, où des contraintes législatives et constitutionnelles complexifient l’utilisation de ces fonds », a noté le président de la BOAD.
Cependant, Ekué reste optimiste quant aux perspectives de ce modèle. « J’ai discuté de cette idée avec le président Macron, et il m’a encouragé à poursuivre dans cette voie, malgré les vents contraires », a-t-il confié. Le soutien de pays comme la France, qui a déjà exprimé son appui à la réorientation des DTS, pourrait être décisif pour faire avancer cette initiative sur la scène internationale. Même si la réglementation de la BCE ne lui permet pas d’y participer directement, la France, aux côtés d’autres grandes économies, soutient déjà l’initiative de la BAD et de la BID en contribuant au fonds de stabilisation adossé au mécanisme de réallocation via capital.
L’avenir de l’Afrique selon Serge Ekué
Pour Serge Ekué, la mobilisation des DTS représente une opportunité unique pour l’Afrique de construire un modèle de financement adapté à ses besoins. Le spécialiste des marchés de capitaux a plaidé pour une réforme structurelle du système financier mondial, en vue de permettre aux pays africains d’accéder à des financements à grande échelle. Mais, persiste-t-il, « l’avenir de l’Afrique dépendra de notre capacité à utiliser des instruments financiers mondiaux de manière innovante. Nous ne pouvons plus nous permettre de suivre des modèles imposés par d’autres », a-t-il déclaré, en référence à l’avenir des DTS et au rôle des banques de développement. « La France, par exemple, n’a pas besoin des DTS pour lever des fonds, tout comme l’Arabie saoudite ou le Japon. En revanche, les pays africains, eux, en ont besoin. »
Fiacre E. Kakpo, de Bruxelles
window.fbAsyncInit = function() {
FB.init({version: ‘v2.3’,appId: ‘103459506425194’, status: false, cookie: true, xfbml: true});
FB.Event.subscribe(‘comment.create’, jfbc.social.facebook.comment.create);
FB.Event.subscribe(‘comment.remove’, jfbc.social.facebook.comment.remove);
FB.Event.subscribe(‘edge.create’, jfbc.social.facebook.like.create);
FB.Event.subscribe(‘edge.remove’, jfbc.social.facebook.like.remove);
};
(function(d, s, id){
var js, fjs = d.getElementsByTagName(s)[0];
if (d.getElementById(id)) {return;}
js = d.createElement(s); js.id = id;
js.src = “https://connect.facebook.net/fr_FR/sdk.js”;
fjs.parentNode.insertBefore(js, fjs);
}(document, ‘script’, ‘facebook-jssdk’));
(function(d, s, id) {
var js, fjs = d.getElementsByTagName(s)[0];
if (d.getElementById(id)) return;
js = d.createElement(s); js.id = id;
js.src = “//connect.facebook.net/en_GB/sdk.js#xfbml=1&version=v2.5&appId=103459506425194”;
fjs.parentNode.insertBefore(js, fjs);
}(document, ‘script’, ‘facebook-jssdk’));
by : Agence Ecofin
Source link