(Agence Ecofin) – Rencontrée lors de la 3e édition du sommet Finance en Commun (FiCs) qui s’est tenu à Abidjan les 19 et 20 octobre, avec pour thème la transition énergétique juste en Afrique pour une relance durable, Maria-Shaw Barragan s’est livré dans une interview à l’Agence Ecofin. La directrice du département de la Banque européenne d’investissement (BEI), qui gère les opérations de prêt en Afrique, dans les Caraïbes et le Pacifique, en Asie et en Amérique latine, revient sur les engagements de son institution sur le continent. Gaz, transition énergétique, financement d’adaptation… ont, entre autres, meublé cet entretien.
Agence Ecofin (AE) : Que finance la Banque européenne d’investissement (BEI) en Afrique ?
Maria-Shaw Barragan (MSB) : Nous finançons le secteur public et le secteur privé. La moitié de tout ce que nous faisons est destiné au secteur privé. La BEI investit surtout dans la lutte contre les dérèglements climatiques et dans l’adaptation.
Nous investissons près de 50% dans le climat. Le reste va vers la santé, le digital. La BEI favorise l’épanouissement des PME et des microfinances grâce à des prêts que nous octroyons.
Je peux vous dire que ce sont des projets à haut impact de développement social et économique. Même si nous savons qu’il y a encore des faiblesses, c’est l’impact qui est le plus important pour nous. Nous faisons suivre, de chaque projet que nous finançons, un suivi-évaluation pointu, par les soins de nos consultants dans tous les secteurs.
Agence Ecofin : Que représente le continent dans votre portefeuille d’investissements ?
MSB : Il faut d’abord rappeler que la BEI intervient surtout dans l’Union européenne (UE) et la majorité de nos activités y sont déployées.
L’Afrique bénéficie de près de 50% de nos investissements en dehors de l’UE. Si l’on exclut l’Afrique du Nord, environ 35 à 40% de nos prêts étaient destinés à l’Afrique subsaharienne. Nous prévoyons d’augmenter le total des prêts que nous mettons à la disposition de l’Afrique subsaharienne parce que nous avons un mandat particulier de l’UE de travailler avec les pays les moins développés. En dehors de l’UE, l’Afrique est notre priorité. Car, comparativement aux autres continents, l’Afrique abrite plus de pays fragiles.
Nous avons également un partenariat avec l’Asie et l’Amérique latine qui ne concerne pas le développement. 90% de nos interventions dans ces régions sont plutôt axées sur des actions climatiques comme la réduction des gaz à effet de serre et l’adaptation.
Agence Ecofin : Face aux tensions géopolitiques qui prévalent actuellement et le repositionnement des grandes puissances, en tant que banque d’investissement, la BEI pense-t-elle à un réajustement de sa stratégie en Afrique ?
MSB : Tout le temps! Nous nous adaptons chaque fois aux priorités des pays dans lesquels nous intervenons. Nous avons de très bons projets sur lesquels nous travaillons actuellement. Notamment des projets de reboisement dans les zones de production de cacao, pour nous assurer qu’il n’y aura pas de réduction de la forêt. Nous avons également des projets d’énergies renouvelables, de transports en commun. Pour la BEI, ce sont de nouvelles façons d’agir contre le changement climatique.
Il est trop tôt pour donner des chiffres. Il faut encore attendre l’année prochaine, mais nos engagements sur ces projets pourraient avoisiner des centaines de millions d’euros.
Agence Ecofin : Par la voix de son VP, Ambroise Fayolle, la BEI a réitéré son engagement à ne plus investir dans les projets impliquant le gaz. Avec la crise russo-ukrainienne, on a pu observer la ruée des pays africains vers les producteurs africains pour diversifier leurs sources d’approvisionnement. Peut-on s’attendre à un réajustement de la position de la BEI pour plus de flexibilité ?
MSB : Nous en parlons régulièrement. En ce qui concerne la question elle-même, nous faisons des financements pour des investissements de longues durées. Or, si la BEI se lance dans le financement d’une source d’énergie en gaz, cela devrait prendre 3 à 4 années de construction, pour une vie économique de 25 ans. Alors qu’on sait qu’avec l’Accord de Paris, les pays africains ont convenu de ne plus utiliser ces sources d’énergie. Ce serait un mauvais investissement si la BEI investissait à nouveau dans le gaz. Nous aurons des actifs qui seront inutilisables avant la fin de leur cycle de vie.
C’est pourquoi, nous pensons plutôt que ce dont l’Afrique a besoin est l’investissement dans les énergies renouvelables pour éviter de commettre les mêmes erreurs que ce qui a été fait sur d’autres continents. Par exemple, l’Europe qui, malheureusement, dépend encore fortement du gaz. Notre rôle est d’accompagner l’Afrique vers un meilleur avenir, et c’est ce que nous essayons de faire.
Agence Ecofin : Toutes les parties prenantes sont d’accord que l’Afrique a besoin d’une transition énergétique juste. Mais le contenu de cette transition semble varier d’une obédience à une autre. Au sens de la BEI, quel est le contenu d’une transition juste en Afrique ?
MSB : C’est une transition énergétique qui profite à la population avec la création de nouveaux emplois verts, et offrant des possibilités larges comme l’énergie solaire.
Agence Ecofin : La transition énergétique en Afrique, c’est donner de l’électricité à 600 millions de personnes et doter 300 millions autres d’un dispositif de cuisson propre. Pour la BAD, le gaz est une énergie de transition. De ce côté, vous n’êtes pas sur la même longueur d’onde. Pensez-vous que l’Afrique pourra faire face à ces défis colossaux avec des énergies aussi intermittentes comme le solaire ?
MSB : Pour résoudre les problèmes que vous avez évoqués, il peut y avoir des solutions telles que les batteries de forte intensité ou des systèmes de pompage, qui pompent l’eau en journée et la nuit, cette réserve d’eau étant utilisée pour générer de l’électricité. Il y a aujourd’hui autant de solutions énergétiques. C’est dans ce sens que nous investissons en Afrique. Ce qui est inadmissible, c’est d’investir dans un projet qui ne sera plus fonctionnel dans 10 ans.
L’Afrique a d’autres besoins et nous ne manquons pas de suggérer aux Etats d’investir dans des projets qui vont servir dans la durée.
Agence Ecofin : quelles sont vos attentes pour ce sommet Finance en commun ?
MSB : J’espère qu’il y aura une position bien unifiée des banques publiques de développement à tous les niveaux : le niveau national, régional et multilatéral pour nous présenter à la COP 27 avec plus d’offres de financement pour le changement climatique. Surtout pour l’adaptation. Surtout pour l’Afrique. J’espère qu’il y aura beaucoup plus de projets qui vont nous permettre de parvenir aux compromis qui avaient été faits dans le passé.
Interview réalisée par Fiacre E. Kakpo, envoyé spécial à Abidjan
window.fbAsyncInit = function() {
FB.init({version: ‘v2.3’,appId: ‘103459506425194’, status: false, cookie: true, xfbml: true});
FB.Event.subscribe(‘comment.create’, jfbc.social.facebook.comment.create);
FB.Event.subscribe(‘comment.remove’, jfbc.social.facebook.comment.remove);
FB.Event.subscribe(‘edge.create’, jfbc.social.facebook.like.create);
FB.Event.subscribe(‘edge.remove’, jfbc.social.facebook.like.remove);
};
(function(d, s, id){
var js, fjs = d.getElementsByTagName(s)[0];
if (d.getElementById(id)) {return;}
js = d.createElement(s); js.id = id;
js.src = “https://connect.facebook.net/fr_FR/sdk.js”;
fjs.parentNode.insertBefore(js, fjs);
}(document, ‘script’, ‘facebook-jssdk’));
(function(d, s, id) {
var js, fjs = d.getElementsByTagName(s)[0];
if (d.getElementById(id)) return;
js = d.createElement(s); js.id = id;
js.src = “//connect.facebook.net/en_GB/sdk.js#xfbml=1&version=v2.5&appId=103459506425194”;
fjs.parentNode.insertBefore(js, fjs);
}(document, ‘script’, ‘facebook-jssdk’));
by : Agence Ecofin
Source link